2008-05-30 – Zonage hôtelier : appréhensions…

Grosse réunion de travail, mercredi soir le 28. Le Conseil de quartier recevait les professionnels de la Division de la gestion du territoire de l’Arrondissement de La Cité qui exposaient et expliquaient la proposition de révision réglementaire du zonage de la fonction hôtellerie dans le Vieux-Québec Haute-Ville, Basse-Ville et Cap-Blanc. L’intérêt pour cette séance était exacerbé par son importance dans le combat contre l’hôtellerie illégale, expression que Brian Aubé, directeur général de l’Association hôtelière de la région de Québec, aimerait bien voir changée pour «hébergement illégal».

Jacques Faguy, directeur de Division de la gestion du territoire, Françoise Roy, conseillère en urbanisme, André Martel, conseiller en consultations publiques et Jacques Joli-Cœur, conseiller municipal, partageaient l’avant-scène du gymnase des Ursulines avec les membres du Conseil de quartier, présidé par Geneviève Roy.

Raymond Dion, membre du Comité exécutif et responsable du dossier habitation, prenait place dans l’assistance avec quelque 70 résidants, hôteliers et autres hébergeurs.

L’enjeu

D’entrée de jeu, Jacques Joli-Cœur déclare que le souhait de la Ville c’est qu’au 500e anniversaire de la Ville, le Vieux-Québec, berceau de la civilisation européenne en Amérique du nord, soit encore un lieu vivant et habité par au moins autant de résidants qu’aujourd’hui. La révision réglementaire en cours vise cet objectif, dit-il.

L’esprit

Jacques Faguy explique l'esprit qui guide la Ville dans la révision réglementaire. Trente ans, dit-il, après l’adoption du premier règlement de zonage du Vieux-Québec, en 1977, et après trente ans de gestion en vertu de droits acquis, il est temps de prendre acte de la situation, reconnaître que certaines zones réputées résidentielles ne le sont plus du tout et tenter de contrôler efficacement l’activité hôtelière plutôt que de vivre dans une certaine fiction.

Ainsi, on pourrait s’adapter à la tendance touristique mondiale qui amène les visiteurs à louer des «résidences de tourisme». On nomme ainsi une unité dans laquelle on retrouve, en plus de la chambre, une cuisine et un salon. Un appartement, quoi, ou un condo. Les résidences de tourisme ne sont actuellement pas permises en dehors des zones d’hôtellerie. Or c’est une des deux principales sources d’hébergement illégal.

Raymond Dion souligne que dans certains secteurs de la ville, particulièrement dans le Vieux-Québec, le taux d’inoccupation des logements est inférieur à 1% et qu’en telles circonstances, il est inacceptable de perdre des logements au profit de l’hébergement illégal. Il affirme le désir de la Ville de garantir la qualité de notre accueil hôtelier et d’assurer l’équité fiscale.

La proposition

Françoise Roy explique la proposition de la Ville. D’abord la Stratégie de développement et de gestion des établissements hôteliers du Vieux-Québec, qui servira d’une part à encadrer l’hôtellerie légale, soit aux endroits où elle sera permise et à éliminer l’hébergement illégal, soit là où l'hôtellerie ne sera pas admise.

Puis le zonage proprement dit, qui détermine les zones où l’hôtellerie est permise.

Le problème

Avant 1977, il n’y avait pas de règlement de zonage dans le Vieux-Québec. Chacun faisait ce qu’il voulait, où il le voulait. C’est d’ailleurs cette anarchie qui a suscité la fondation du CCVQ en 1974. Il en est résulté 31 établissement hôteliers en pleines zones résidentielles, établissements pré-1977 jouissant aujourd’hui de droits acquis et donc indéracinables. Mais contrôlables, et c’est ce que la Stratégie de développement et… permettra de faire, entre autres choses.

Il n’en reste pas moins que ces 31 établissements (voir le tableau à la page 18 du document de présentation précité) sont là, au beau milieu des zones résidentielles, et qu’en plus, il y a plusieurs appartements qui sont loués illégalement en résidences de tourisme.

Mais le pire, c’est qu’alors qu’on compte 3350 logements dans le Vieux-Québec, on dénombre 2800 unités d’hébergement légales et un nombre difficile à déterminer avec précision mais qui doit se situer aux environs de 350, en unités illégales. Un total de plus de 3100 unités d’hébergement. En somme, un nombre quasi égal d’unités de logement et d’unités d’hébergement, un ratio inacceptable.

C’est ce ratio que le CCVQ veut voir rééquilibré.

Les appréhensions

Denis L’Anglais du CCVQ a bien exprimé le danger. C’est que si cette proposition de zonage devait demeurer telle quelle, on consacre le résultat d’une érosion de plusieurs années du tissu résidentiel. Le «gruyère» sera figé dans son état de gruyère.

On élargit trop les espaces pour les résidences de tourisme. On ne doit pas, dit-il, simplement reconnaître l’état de situation actuel. On doit travailler pour infléchir la tendance, la renverser même, de sorte que le ratio redevienne plus favorable à la résidence.

Paul Angers, des Condomimiums d'Argenson, tout en se déclarant surpris d’une telle ouverture aux résidences de tourisme, opine qu'ainsi les associations de propriétaires de condo auraient beaucoup plus de difficultés à contrôler le phénomène d’hébergement illégal, ou intempestif même s’il devient légal, dans leurs édifices.

Quant aux hôteliers, leurs appréhensions sont plutôt liées à l’incertitude actuelle. Brian Aubé décrit l’«épée de Damoclès» qui insécurise les hôteliers dont les droits acquis ne sont pas coulés dans le béton. Il souhaite que les droits dits acquis soient confirmés acquis.

Les armes

Raymond Dion a confirmé la volonté de la Ville et du maire Labeaume de combattre l’hôtellerie illégale, volonté confirmée par la lettre récemment expédiée aux propriétaires du Vieux-Québec. Le combat est difficile, comme Jacques Faguy l’a une nouvelle fois exposé aux participants, beaucoup plus que les gens peu au fait des nécessités légales peuvent se l’imaginer. M. Dion a rappelé la récente décision d’augmenter les amendes de 100 $ au maximum permis par la Loi de Cités et villes, soit 1000 $. Puis il a annoncé les trois «armes» en cours d’élaboration :

  • l’harmonisation des permis d’hôtellerie accordés par la Ville avec les attestations de qualité hôtelière décernés par le Ministère du Tourisme;
  • l’augmentation des amendes au dessus du plafond actuel de 1000 $, augmentation nécessitant une modification de la charte de la Ville par le gouvernement du Québec. À cet égard, Denis L’Anglais a suggéré à Raymon Dion que les amendes puissent se cumuler et doubler à chaque récidive;
  • le pouvoir des inspecteurs de délivrer un constat d’infraction – style contravention de stationnement – lors d’une visite révélant un usage d’hébergement illégal.

Les questions

Benoît Bossé et Christine Gosselin ont formulé une série de questions :

  • Quelles seront les normes pour les résidences de tourisme ?
  • Les couette et café : va-t-on les réglementer en vertu du critère de séparation physique en plus du critère du nombre ? D’ailleurs la proposition, en ce qui les concerne, va à l’encontre des orientations du Plan directeur.
  • Quelle est la capacité d’accueil du Vieux-Québec ? Combien d’unités d’hébergement peut-il accueillir sans écraser la fonction résidentielle ? Peut-on répartir les résidences de tourisme plus largement sur le territoire, en dehors du Vieux-Québec pour en diminuer la densité dans le quartier ?
  • Comment gérer la tendance mondiale à la location de résidences de tourisme ? En y cédant simplement ? En la canalisant ?
  • On parle de Stratégie de développement et de gestion des établissements hôteliers du Vieux-Québec. Veut-on vraiment développer l'industrie hôtelière dans le Vieux-Québec ? Ou la contenir ? Ou la réduire ? Cette stratégie doit être solidement arrimée à l’objectif du 500e.

Les incontournables

Le règlement de zonage constitue la fondation de la construction d’une ville. Il s’agit donc d’une question d’importance extrême. Or dans le Vieux-Québec, le zonage est d’une très grande complexité, largement plus que dans la grande majorité de secteurs de la ville. La quantité d’éléments à considérer et harmoniser est par conséquent si importante que la fenêtre temporelle pour les étudier est trop exigüe. C’est pourquoi Louis Germain, président du CCVQ, a réclamé la tenue de réunions de discussion additionnelles.

L’objectif déclaré est d’atteindre le 500e de la ville avec une population résidante florissante dans le Vieux-Québec. Cela requiert aujourd’hui une excellente vision et une volonté lucide de contrôler les forces du marché.

Et comme le demandait une participante à l’assemblée, Linda Laflèche, que va faire la Ville pour attirer des jeunes familles dans le Vieux-Québec. Il faut de la relève pour y être encore énergiquement, dans cent ans.

Le processus

La phase actuelle en est une d’information et elle va se poursuivre jusqu’à la fin juin. Elle a débuté le 5 décembre dernier avec le dépôt de propositions pour la rue St-Jean, la côte du Palais, la côte de la Fabrique et le Carré d’Youville. Ces rues sont dites «à fonction mixte», c’est-à-dire que la résidence, le commerce, l’hôtellerie et l’institutionnel peuvent y cohabiter.

Une seconde séance s’est tenue le 23 avril, avec des propositions portant sur les autres rues à fonction mixte du quartier. Puis avant-hier, troisième séance portant strictement sur la fonction hôtelière, partout dans le quartier. Une quatrième séance aura lieu le 18 juin prochain. On y traitera des zones exclusivement résidentielles, récréatives et publiques.

La Ville reçoit actuellement questions et commentaires, modifiera son projet au besoin pendant que le Conseil de quartier affermit son opinion sur la question. La proposition finale sera acheminée par la Division de la gestion du territoire au Conseil d’arrondissement en septembre.

On passera alors aux consultations publiques. Les 30 septembre et 1 octobre, l’arrondissement de La Cité recevra individus, groupes et associations pour accueillir leurs opinions et avis. Par la suite, les Conseils d’arrondissement et le Conseil de Ville adopteront avec ou sans modification le règlement de zonage (cadre et d’arrondissement).

On prévoit adopter la réglementation finale au Conseil municipal vers la fin de décembre 2008.

L’interaction

D’ici là, tout citoyen peut communiquer avec la Ville pour obtenir de l’information personnalisée, i.e. connaître les impacts de la réglementation proposée sur sa propre résidence. On peut aussi commenter à loisir les orientations proposées, par courriel à la Ville. Consultez les informations à cet effet à la page 6 de l’Avant-projet de Règlement de l’Arrondissement de la Cité sur l’urbanisme. On y parle du 1 juin comme date limite mais bon... peut-être va-t-on pouvoir communiquer au-delà de cette date.

La suite

Prochaine assemblée, le 18 juin. On parle du zonage résidentiel.

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