Par Benoît Bossé
À la suite de la séance publique de consultation du 3 décembre dernier, le CCVQ a fait part au Conseil de quartier de certaines inquiétudes.
D’abord, il convient de rappeler les efforts remarquables consentis par plusieurs résidants et commerçants du Vieux-Québec lors de l’élaboration du Plan directeur du quartier qui doit nous guider au cours des prochaines années. Il est malheureux de constater que plusieurs des intervenants d’hier ne s’étaient jamais manifestés lors de cet exercice. Ils ont plutôt donné l’impression de protéger leur intérêt personnel que de travailler au bien commun.
Plusieurs des interlocuteurs ont invoqué la difficulté d’accueillir des commerces de services parce qu’il manque de résidants pour les fréquenter. Là est le nœud du problème ! Si on veut inverser la tendance, il faut donner un vigoureux coup de barre en faveur de l’augmentation du résidentiel. Rappelons qu’il y a actuellement autant de chambres d’hôtellerie qu’il y a de logements dans le quartier. Et ça, sans compter tous les résidants secondaires qui ont fait l’acquisition de condos pour n’y séjourner que quelques mois par année… L’équilibre des fonctions ne joue plus en faveur des résidants permanents qui sont de moins en moins nombreux. Autoriser les résidences de tourisme signerait le déclin de l’habitation dans notre quartier, provoquant par le fait même sa disneylandisation.
Il est intéressant de visiter les sites suivants pour y lire certains documents qui mettent en lumière la dangereuse cohabitation entre le tourisme et le résidentiel.
Consultez d’abord la Charte du tourisme durableà laquelle Tourisme Québec souscrit et à laquelle la Ville de Québec, en tant que ville du patrimoine mondial, doit ou devrait souscrire, si cela n’est pas encore fait. Portez votre attention sur les recommandations 6 à 9 inclusivement.
Puis allez voir ce qui se dit à Chamonix, une ville éminemment touristique, qui a eu la brillante idée de tenir des sommets sur le tourisme durable ! On a en tiré une brochure qui résume la démarche.
Consultez aussi les critères mis de l’avant par la Ville de Banff qui est aussi inscrite, comme Québec, sur la liste du patrimoine mondial. Vous y verrez notamment que la ville met des limites à la croissance du commerce.
Méditez sur cette page qui précise que «L’avenir et la sauvegarde de Venise passent par le maintien des populations dans leur habitat d’origine et des activités artisanales, commerciales et administratives qui permettent à la population de vivre.»
Et enfin, un article paru dans Le Devoir : «Le patrimoine mondial en danger - Le tourisme comme arme de destruction massive».
Le CCVQ est également inquiet de l’ouverture que les recommandations du Conseil de quartier font à l’établissement de bureau administratif au 1er étage, malgré l’application de la notion d’habitation protégée. Rappelons que cette notion a été obtenue après une chaude lutte avec les autorités municipales. Tout accroc à cette notion risque d’ouvrir la porte à d’autres demandes similaires. Il faudrait que les commerçants qui demandent d’avoir un bureau à l’étage fassent la preuve que le premier étage n’a jamais été utilisé à des fins résidentielles. Le simple fait qu’il soit utilisé à d’autres fins ne doit pas créer un droit acquis, surtout si cet usage est opéré de façon dérogatoire. De plus, la notion d’usage temporaire nous apparaît illusoire, les commerces gardant leurs droits tant et aussi longtemps que le zonage n’est pas modifié et tant que l’usage n’a pas perdu ses droits acquis, ce qui risque de nous amener très très loin.
Par ailleurs, le CCVQ comprend que le Conseil souhaite, par cette ouverture, atteindre d’autres objectifs très louables concernant la remise en état de logements vacants, le ravalement de certaines façades, etc. Nous croyons que ces objectifs peuvent être atteints par d’autres moyens, notamment par des incitatifs financiers et/ou des programmes de revitalisation. En terme de zonage, les secteurs problématiques pourraient être assujettis à un plan d’aménagement d’ensemble ou à un plan d’implantation et d’intégration architecturale ou à toute autre technique que la Charte de la Ville de Québec pourrait prévoir.
Toutefois, si le Conseil souhaitait poursuivre dans cette voie, le CCVQ émet quand même des réserves. Nous doutons de la capacité de la formule du zonage pour y inclure les conditions que le Conseil préconise. Nous avons des craintes sur le caractère légal de ces inclusions. Comme les services juridiques de la ville sont plutôt timides, voire conservateurs, il y a fort à parier qu’ils s’opposeront à l’inclusion de telles conditions dans le zonage de ces zones. Il faudrait donc que le Conseil précise qu’à défaut de pouvoir inclure les dites conditions au zonage, il recommande de ne pas permettre les bureaux administratifs au 1er étage.
Le CCVQ félicite le Conseil de quartier pour le travail accompli et le remercie de son implication tout en lui offrant sa collaboration pour arriver aux meilleures solutions dans ces difficiles dossiers.