Le début d’un temps nouveau?

Louis Germain

Gauche/droite. Le rapport de force est-il en train de changer? Le résultat des élections américaines permet d’en rêver. Alors rêvons !

Début des années ’80 au États-Unis, le momentum passe à droite. Jimmy Carter l’humaniste est défait par Ronald Reagan le fringant. Les fleurs du peace and love fanent à toute vitesse. Mai ’68 tombe dans l’oubli. On noie le malaise du Vietnam en gonflant les muscles face à l’«axe du Mal». On veut affamer l’état-providence et refiler à l’individu toute la responsabilité de son bien-être, de son succès.

Début siècle XXI, c’est l’arrogance, l’unilatéralisme, l’accroissement phénoménal des disparités économiques, tant entre individus qu’entre peuples, la résurgence de l’insécurité, la «normalisation» du terrorisme.

La tension augmente. L’élastique s’étire.

L’histoire nous enseigne que toutes les révolutions sont issues de l’excès de tension entre pauvres et possédants. Allons nous laisser l’élastique se rompre?

Jusqu’à il y a une trentaine d’années, les immigrants quittaient leur pays d’origine mus par la curiosité et/ou par l’espoir d’une vie meilleure. Aujourd’hui, la plupart des mouvements migratoires sont le résultat du désespoir, une fuite. Et ça s’accélère. Ces immigrés «fuyards» se conduisent alors comme tels et recherchent dans le nouveau pays la sécurité parmi les leurs qui y sont déjà installés. Leurs réflexes sont à l’opposé de l’intégration culturelle à ce nouveau pays et tout au refuge strictement économique. Les ghettos s’installent.

Vous êtes surpris de constater ici les excès d’une xénophobie par ailleurs naturelle?

Ce mardi, coup de théâtre ! Les démocrates reprennent le contrôle législatif après 12 ans. Mais surtout, une femme, Nancy Pelosi, se hisse au troisième rang de la hiérarchie étatsunienne.

Ça, c’est une véritable mutation.

On pourrait en jaser autour de centaines de sujets mais n’en prenons qu’un seul en exemple : la guerre en Irak, ce Waterloo du trio Bush/Cheney/Rumsfeld et qui pourrait bien devenir le Waterloo des États-Unis.

Ce que cette guerre a une fois de plus confirmé, c’est que la guerre traditionnelle est maintenant impuissante face aux volontés locales. Elle ne peut que détruire, elle ne peut triompher, elle ne peut conquérir ni vaincre. Maintenant, la guerre est urbaine, elle devient guérilla et s’appuie sur l’attentat.

La guerre perd sa guerre. Vive la terreur.

Alors que faire en Irak? On sait maintenant qu’on ne gagnera jamais militairement sur le terrain. Se retirer? la queue entre les jambes? en laissant les extrémistes provoqués triompher et donner fierté à toutes les déliquescences? Jamais !

Mais alors quoi?

Pourquoi ne serions-nous pas sauvés par les femmes?

Nancy Pelosi pourrait fort bien être accompagnée dans deux ans par Hillary Clinton. L’oncle Sam deviendrait la tante Sam. Quel bouleversement ! Profitons-en.

D’ici les présidentielles de 2008, pourquoi Hillary ne démarrerait-elle pas, en s’appuyant sur Jimmy Carter notamment, une initiative diplomatique qui viserait à restaurer l’équilibre mondial.

Elle pourrait proposer un retrait rapide de l’Irak en contrepartie de l’instauration d’une véritable représentativité des peuples au sein des Nations-Unies. Une refonte du Conseil de sécurité par l’abandon notamment du droit de veto des cinq grandes puissances. La crédibilisation de l’ONU. La mise en action de l’esprit initial de la Société des nations. Un équilibre entre les nations. Un respect de fait.

La sécurité mondiale passe par une baisse des disparités et la compréhension de la culture de l’Autre. Un membre de la banque centrale étatsunienne, Janet Yellen – une femme, tiens donc – a déclaré avant-hier que les inégalités «minent la démocratie». Le bon sens est en train de faire sa réapparition dans l’économie, aujourd’hui prisonnière d’une droite sans vergogne.

Transformer la guerre en Irak – de désastre en opportunité pour l’humanité. Allez ! mesdames Rodham Clinton et Pelosi, foncez. Tendez la main aux peuples arabes et aux musulmans. Changez le paradigme à Washington. Faites que la paix repose sur le dialogue, l’équilibre économique et social et non sur la force, ce pouvoir démodé, discrédité et émasculé par le terrorisme. Si vis pacem, para bellum, disait l’ami Jules César. Ce n’est plus vrai.

Supposons que les centaines de milliards de la guerre en Irak aient été dépensés pour améliorer l’économie du Mexique et du Guatemala. Aujourd’hui, personne ne penserait à construire un rideau de fer entre les États-Unis et le Mexique.

Hillary, Nancy, changez la donne ! Soulagez l’élastique !

Les femmes au pouvoir. Pour vrai. Différemment. Le retour de la gauche après trente ans? Rêvons !

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