Comité des citoyens du Vieux-Québec (CCVQ)

Organisme sans but lucratif dédié au maintien et à l'amélioration de la qualité de vie de ses citoyens et de son patrimoine

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 réaménagement de l'autoroute Dufferin-Montmorency

 

Mémoire présenté
à la
Ville de Québec

 

 Mars 2000


La position du Comité des citoyens du Vieux-Québec

Le Comité des citoyens du Vieux-Québec souscrit aux objectifs poursuivis par le projet.  Ainsi, il adhère à la quasi totalité des éléments du concept retenu.  Qu'il s'agisse de la réduction du nombre de voies de circulation, de l'élimination des bretelles de la Potasse et Dauphine, du réalignement de la côte d'Abraham, des phases prioritaires pour les traverses piétonnières ou de l'élargissement et de l'aménagement des trottoirs, le comité souscrit aux solutions proposées.

Son objection fondamentale va à la présence du terre-plein, entre la rue D'Aiguillon et le boulevard René‑Lévesque.  Bien qu'il soit réaménagé, le terre-plein proposé demeure un terre-plein, confirmant le caractère autoroutier de cette artère.  Malgré l'élargissement des trottoirs et la réduction notable de la chaussée, la barrière entre les deux quartiers subsisterait.  À l'instar du mémoire qu'il avait déposé en 1994, le comité croit qu'un réaménagement conservant un terre-plein ne pourra atteindre pleinement les objectifs que nous nous sommes fixés collectivement de retisser les liens entre les quartiers Saint‑Jean‑Baptiste et du Vieux‑Québec.

La sécurité des piétons

Au cours des premières séances de la présente consultation, les autorités municipales ont surtout invoqué la sécurité des piétons, et dans une moindre mesure celle des automobilistes, pour justifier l'existence du terre-plein.  Sur la foi d'analyses réalisées à partir de la documentation américaine sur le sujet, les experts de la Ville de Québec affirment que la présence d'un terre-plein diminuerait de près de deux fois les accidents impliquant des voitures ou des piétons.  Pourtant, les statistiques fournies à la suite des séances d'information (voir Annexe, Accidents survenus sur le boul. René‑Lévesque Est entre Dufferin et Turnbull et Accidents survenus sur l'autoroute Dufferin entre d'Abraham et René‑Lévesque) nous apprennent que, sur le boulevard René‑Lévesque, même si le nombre d'accidents soit passé de 82 avant les travaux de réfection (1994 et 1995) à 119 après ces travaux (1998 et 1999), le nombre de piétons impliqués est passé de trois à zéro.

De plus, le détail de ces statistiques nous apprend également que les piétons impliqués dans des accidents, avant 1996, l'étaient à l'intersection Dufferin et Honoré‑Mercier, entre De Lorne et Amérique‑Française et entre Claire‑Fontaine et Turnbull.  Dans le premier cas, la présence d'un terre-plein n'aurait rien changé à l'affaire puisqu'il s'agit d'une intersection.  Dans les deux autres cas, puisque les accidents se sont produits entre des intersections, cela laisse à penser que s'il y a eu accidents c'est que les piétons ont traversé ailleurs qu'à une intersection, ce qui est pour le moins imprudent, sinon illégal.  Là encore, la présence d'un terre-plein n'y aurait rien changé.  Quant à l'absence d'accidents impliquant des piétons constatée en 1998 et 1999, le comité croit qu'elle est directement reliée à l'augmentation du nombre de traverses piétonnes protégées, les piétons s'étant eux-mêmes adaptés aux nouvelles consignes.

Par ailleurs, le comité est étonné du peu de cas que semblent avoir les partenaires du projet pour le nombre croissant d'accidents automobiles observés à l'intersection Dufferin et Honoré‑Mercier, le projet présenté ne proposant aucune solution pour celle-ci.

Quant aux huit accidents impliquant des piétons inventoriés le long de l'autoroute, entre d'Abraham et René‑Lévesque, pour les années 1996 à 1999 inclusivement, cinq se sont produits à l'intersection de la rue St-Jean, deux à l'intersection de la rue St-Joachim et un à l'intersection du boulevard René‑Lévesque.  Le comité considère que les problèmes constatés à ces trois intersections seront grandement améliorés, sinon solutionnés, par les phases prioritaires pour les traversées piétonnes.

Enfin, le Comité des citoyens du Vieux-Québec pense qu'un terre-plein inciterait les piétons à prendre des risques, confiants qu'ils seraient de pouvoir s'y réfugier en cas de besoin.  L'absence de terre-plein donnerait plutôt le signal qu'il vaut mieux être prudent et attendre sa lumière avant de traverser et, par la même occasion, indiquerait aux automobilistes qu’il leur faut réduire la vitesse.

La vraie raison

La question de la sécurité des piétons étant plus claire, quelle explication pouvons-nous trouver à la présence du terre-plein ?  Dans la documentation présentée, la raison avancée pour l'aménagement du terre-plein est évoquée dans la section relative à la variante 2 de l'hypothèse 2 où on peut lire que  :  « La zone de terrain ainsi récupérée favoriseraient l'intégration d'un aménagement paysager plus soutenu pour marquer d'un geste fort l'accès au nouveau boulevard et à la colline Parlementaire ».  Le Comité des citoyens du Vieux-Québec est convaincu qu'il s'agit là de la raison principale de son existence.  Le directeur régional du ministère des Transports, rencontré au printemps 1999, nous affirmait que son ministère n'avait aucune exigence quant à la présence ou non d'un terre-plein.  Serait-ce le compromis que la Ville de Québec a trouvé pour donner suite à l'option d’une grande allée centrale que la Commission de la Capitale nationale nous avait dit privilégier ?

Vraisemblablement, cette option privilégiée s'appuie davantage sur des considérations d'esthétisme et de monumentalité que pourrait conférer à l'avenue Dufferin la présence du terre-plein.  Le Comité des citoyens du Vieux-Québec est d'avis que ces considérations, bien que légitimes – et questionnables -, ne sauraient prévaloir sur le nécessaire retissage des quartiers, sur l'urbanisation de l'autoroute, sur le réaménagement des têtes d'îlots donnant sur cette voie.  Il s'interroge sur la pertinence d'engloutir de l'argent public pour la construction et surtout l'entretien d'un terre-plein qui, pour la plus grande partie de l'année, soit d'octobre à mai, serait soit dégarni, soit couvert de neige sale.

Les avantages liés à l'élimination du terre-plein

Le Comité des citoyens du Vieux-Québec croit que l'élimination du terre-plein permettrait de récupérer, sur une distance d'environ 200 mètres, de 9,5 à 5 mètres de terrains exploitables.  En localisant cette bande de terrains soit du côté du Vieux-Québec, soit du côté de Saint‑Jean‑Baptiste, soit de part et d'autre de l'avenue Dufferin, une requalification du tissu urbain deviendrait alors possible.  L'analyse de ces alternatives aurait pu ajouter un éclairage intéressant sur le projet soumis.

Une première analyse permet au comité de considérer le déplacement de l'axe de l'avenue Dufferin vers l'est comme une alternative des plus intéressantes.  Ainsi, et malgré le fait qu'il y ait en bordure de Place Québec diverses servitudes d'utilités publiques, notamment une conduite maîtresse d'aqueduc, le comité croit au développement des têtes d'îlots récupérées.  Des discussions avec des professionnels du génie civil nous confirment que la construction au-dessus d'une conduite d'aqueduc, soit-elle de 47 pouces, est possible moyennant certaines précautions.  Les taxes foncières que ces nouvelles constructions entraîneraient auraient dû inciter les autorités municipales, non seulement à les analyser, mais aussi à vérifier les intentions des propriétaires limitrophes à ce sujet.

Sur cet aspect du concept retenu, à savoir l'architecture et le réalignement des façades, le comité considère que le projet est beaucoup trop timide, ne proposant aucun moyen de mise en œuvre.  À cet égard, le comité estime qu'un simple réaménagement, si beau et si soigné soit-il, ne saurait garantir la revitalisation de cette artère.  Le nouveau boulevard René‑Lévesque en est un exemple frappant.  L'implication des propriétaires riverains demeurant primordiale, des incitatifs municipaux pourraient même être envisagés de manière à promouvoir cette revitalisation.  Ainsi, à titre d'exemple, les propriétaires de Place Québec devraient être incités à profiter de la construction d'éventuel basilaire pour relancer les salles de cinémas qui font cruellement défaut depuis la fermeture du cinéma de Paris.  Le zonage devrait donc permettre l'ouverture de commerces de types centre-ville, assurant une certaine animation sur la nouvelle avenue.  De même, les nouvelles constructions devraient avoir une hauteur maximale équivalente à celle déjà permise dans les quartiers voisins.  Au niveau du design architectural, les nouvelles constructions ou les ajouts qui pourraient être faits devraient être très ouverts sur l'avenue, soit par une fenestration abondante, soit par des murs de verre.  De même, des abris pour la pluie et des structures coupe-vent devraient être privilégiés tout comme la présence des entrées principales des édifices.

Par ailleurs, s'il s'avérait impossible techniquement ou trop coûteux de construire les terrains libérés le long de Place Québec, des aménagements particuliers pourraient être envisagés de part et d'autre de l'avenue Dufferin, à la hauteur du boulevard René‑Lévesque.  Ainsi, des belvédères, à l'image de celui qu'on souhaite construire dans le bas de l'avenue et de ceux qui existent déjà sur le boulevard René‑Lévesque, pourraient être érigés de part et d'autre de l'avenue qui mettraient en valeur les percées visuelles en direction des Laurentides.  Ce nouvel attrait inciterait également les visiteurs et les congressistes à poursuivre leur visite et à descendre l'avenue, en direction de la rue St-Jean et de la Basse-Ville.

Autre avantage intéressant, le déplacement de l'axe de l'avenue vers l'est pourrait améliorer l'intersection René‑Lévesque et Honoré‑Mercier.  En effet, ainsi déplacées, les voies de circulation en direction sud seraient mieux alignées, facilitant le contournement problématique du rond-point qui devrait aussi être déplacé vers l'est.  De même, tous les coins de cette intersection devraient être, au maximum, à angle droit, contribuant de la sorte à réduire la vitesse, à confirmer le caractère urbain de l'avenue Dufferin et du boulevard René‑Lévesque et à récupérer un peu plus de terrain à réaménager.

Des suggestions et des recommandations

Le Comité des citoyens du Vieux-Québec aimerait proposer quelques suggestions visant la bonification du projet.  Il serait approprié de profiter de l'élargissement des trottoirs pour y installer du mobilier favorisant la vie urbaine :  bancs publics (peut-être orientés vers les Laurentides plutôt que vers la voie publique), boîtes téléphoniques et abribus type Vieux-Québec.  À l'instar des spécialistes en la question, ce mobilier urbain devrait être entretenu régulièrement, réparé dès que nécessaire et les traces de vandalisme, s'il y en avait, devraient être effacées le plus rapidement possible.

La période estivale étant très courte, le choix des végétaux est aussi très important.  Le comité ne remet pas en question l'utilisation de l'orme d'Amérique.  Il considère ce choix très intéressant.  Il souhaiterait toutefois qu'on intègre des conifères dans les aménagements paysagers.  Certes, le caractère de l'avenue, sa forte pente qui nécessite l'utilisation abondante de fondants n'incite pas à leur plantation.  Peut-être faudrait-il essayer quand même, quitte à se tromper...  Ou alors, faudrait-il trouver un végétal qui offre des possibilités plus intéressantes.  Ainsi, un architecte paysagiste nous proposait, par exemple, la construction de formes légères en métal sur lequel pourrait courir de vigne vierge (parthenocissus quinquafolia).   Peu coûteuse, très résistante, au feuillage rouge à l'automne, ses rameaux offriraient, en hiver, un support pour la neige et la pluie verglaçante, créant par le fait même autant de petites sculptures qu'un éclairage judicieux pourrait également mettre en valeur.

Au niveau de la signalisation, le comité souhaite que les feux de circulation soient en bordure de l'avenue plutôt qu'au-dessus d'elle, qu'ils soient synchronisés de manière à éviter la prise de vitesse et à donner priorité aux piétons, que l'affichage commercial soit rigoureusement réglementé et que les éléments de pavoisement, tout comme le pavoisement lui-même, soient discrets.  De même, l'éclairage de l'avenue devrait assurer le confort et la sécurité tant du piéton que de l'automobiliste.

Au chapitre du transport en commun, le comité recommande à la Société des transports de profiter du réaménagement pour lancer une campagne de sensibilisation et d'utilisation des transports en commun.  Cette initiative pourrait contribuer à soulager les impacts négatifs que le réaménagement pourra avoir sur la circulation automobile, tout en augmentant la part des déplacements en transport en commun.

Pour ce qui est des éléments référentiels, le comité croit qu'ils devraient faire l'objet d'un concours public.

Mises en garde et mesures de suivi

Le Comité des citoyens du Vieux-Québec souhaite également faire les mises en garde suivantes.  Quelle que soit la forme que prendra le projet final, le comité s'attend à ce qu'il n'occasionne aucun effet négatif sur la circulation piétonne, notamment à l'intersection avec la rue St-Jean et sur Place d'Youville, lieu dont la requalification n'est pas terminée et qui devrait être libéré de toute pression liée à la circulation, notamment de la part des autocars touristiques.  De plus, la circulation automobile dans le Vieux‑Québec ne devra pas subir d'augmentation significative, tel que l'ont garanti les autorités municipales.

Afin d'être en mesure d'évaluer ces impacts, le comité demande à la Ville de Québec d'établir des mécanismes de suivi auxquels pourraient participer les organismes représentatifs du milieu.  Le comité s'engage, dans la mesure de ses moyens, à participer à de telles mesures.

Le processus de consultation

Le Comité des citoyens du Vieux-Québec ne peut terminer ce mémoire sans revenir sur le processus de consultation.  En effet, malgré la recommandation des commissaires de l'époque qui invitait la Ville de Québec à poursuivre l'analyse des avantages et des inconvénients de chacune des options envisageables et à en soumettre les résultats à une consultation publique, le comité déplore l'absence de vraies discussions sur d'autres partis que celui que les partenaires ont retenu.  La période de questions du 7 février dernier a à peine permis de soulever le voile sur les discussions, tractations et négociations qui se sont déroulées entre les différents partenaires du projet, sans qu'il soit possible de connaître les raisons ultimes du choix retenu.